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  • Photo du rédacteurIsabelle Nadolny

XVIIII - Ombre et lumiere


Une fille de marchand avait affirmé qu’elle ne pourrait aimer que l’homme qui trouverait le moyen de remplir tout l’espace de sa chambre en une journée ! Or sa chambre était aussi vaste que celle d’une princesse dans le plus beau des palais. Plusieurs prétendants étaient déjà venus tenter de relever le défi. Un boutiquier avait voulu remplir la pièce de ses bahuts, un paysan avait essayé avec du foin, un berger avec de la laine, un fermier avec des plumes. Il y avait même eu un batelier qui avait inondé la pièce. A tous, le temps avait manqué en éclairant de ses derniers rayons les espaces vides qui demeuraient dans la pièce.

Arrive enfin un jeune poète, qui reste toute la journée dans la chambre à ne rien faire si ce n’est à regarder la demoiselle. Elle émue par tant de paisible attention, lui rappelle au crépuscule du jour qu’il faudrait tout de même songer à remplir la pièce. Alors le garçon a sorti une bougie de sa poche, l’a posée devant lui, en a allumé la mèche, et sa lumière d’un coup a empli tout l’espace.

On raconte que le soir des noces, la jeune épouse a dit à l’époux :

- En vérité, il y avait un espace dans la pièce que tu n’as pas éclairé. C’était celui qui se trouvait sous la bougie, là où elle reposait !

- C’est vrai, a fait le jeune homme. Pourquoi n’en as-tu rien dit ?

- Parce que, a répondu la nouvelle mariée, je me sens moi-même comme cette chambre que tu as emplie de lumière, conservant toujours au fond de moi une part d’ombre secrète où nul, jamais, ne pourra pénétrer.


Bibliographie :

Contes des sages et fous amoureux / Jean-Jacques Fdida, Seuil, 2008.

Iconographie :

Jeu de minchiate italien, le Soleil, Florence, XVIIe siècle. Bibliothèque nationale de France.










 




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